2007 – USA | |
86' / 97' (version longue) – 1,85:1 - Couleur - Dolby Digital - HDV (tournage) / 35mm (projection) | |
Réalisation | Oren Peli |
Scénario | Oren Peli |
Montage son | David Barbee |
Image | Oren Peli |
Montage | Oren Peli |
Production | Blumhouse Productions |
Avec | Katie Featherston, Micah Sloat, Amber Armstrong... |
Fiche IMDB | http://www.imdb.com/title/tt1179904 |
Fiction ou réalité ? En ces temps sombres d’un cinéma américain post 11 septembre plongé dans la peur et la paranoïa, les frontières esthétiques n’ont jamais été aussi floues. Les genres se décloisonnent, la télévision, forte de ses écrans plats HD, se prend à rêver en grand (voir Lost et Breaking bad, qui jouent de la largeur du cadre), et le cinéma, paradoxalement, laisse de côté ses airs de « grandiose » en abandonnant la pellicule 35 au profit de la caméra DV numérique. Le cinéma se démocratise, chacun peut avoir facilement accès à une caméra. Filmer devient un acte gratuit, comme si le fait de filmer allait provoquer l’évènement, comme l’illustre parfaitement ce petit film. C’est justement là son mérite, d’être « petit ». Petit budget, petite équipe, petit matériel, petits effets spéciaux, petit scénario, et pourtant la prétention de faire quelque chose de grand, un film.
Le concept n’était pourtant pas original dans sa forme pseudo documentaire et surfe sur une vague de succès bien contemporaine que lancèrent d’autres films d’horreur, Cannibal Holocaust, puis Le projet Blair Witch, et enfin le très récent Rec. Tout comme Cannibal Holocaust d’ailleurs, la production a laissé croire, pour faire le buzz, que les acteurs étaient vraiment morts. L’absence de générique accentue cet effet. A sa manière, ce petit film remet en cause la convention institutionnelle du cinéma, le générique, comme l’avaient fait les Monty Python ou Jean Luc Godard dans le but de mettre en abyme le cinéma, de donner conscience du cinéma. De rappeler que ceci n’est qu’un film, avec ses artifices et ses effets. Ce que paradoxalement Paranormal activity ne cesse de faire. Une sorte de revue historique des techniques cinématographique: accélérés, arrêts sur image, plans fixes, conscience de la présence de la caméra, qui devient personnage de la fiction. Paranormal activity 2 et 3 jouent toujours de cette réflexivité cinématographique. Dans le 2, le cinéaste a l’idée de confronter la petite enfance au démon maléfique et invisible. Les études cognitives indiquent qu’un enfant ne fait pas la différence entre ce qu’il voit et son imaginaire. Un plan intéressant est à sauver de ce deuxième épisode: l’enfant regarde son reflet dans un miroir et nous percevons dans ce reflet des mouvements inquiétants. L’enfant semble presque amusé de cela, mais nous, spectateurs adultes, sommes inquiets. Cet enfant semble nous jeter cyniquement au nez que tout ceci n’est qu’une fiction. Dans le 3, dans une scène amusante, le personnage principal « invente » même le panoramique grâce à un moteur de ventilateur.
Mais fermons la parenthèse de la trilogie pour nous reconcentrer sur ce premier épisode, premier, donc vecteur d’un effet de surprise, qui revient à une certaine origine du cinéma: de longs plans fixes à focales courtes avec grande profondeur de champ, pour laisser la liberté au spectateur de scruter l’image à la recherche du moindre indice visuel. Voilà peut être la meilleure trouvaille du film, laisser croire au spectateur qu’il est libre, et ainsi, laisser surgir la peur dans chaque recoin du cadre. Paranormal activity joue des longueurs, ce qui pourra vite lasser les plus impatients, mais l’attente se révèle être hyper angoissante. Dans cette « économie » de cinéma et d’effets cinématographiques, dans ce cadre simplissime, dans un décor épuré (une maison spacieuse avec peu de meubles), bref, dans un quotidien banal va surgir le surnaturel.
Pire encore, le film se joue de nos nerfs et de notre jeu d’anticipation. Dans certaines séquences, un time code sur le côté se met à défiler en accéléré quand rien d’intéressant ne se passe, et revient en vitesse réelle quand la narration reprend son cours, et que le surnaturel surgit. Si nous pouvons parler de narration, dans un scénario rudimentaire et parfois même poussif: pourquoi se filmer sans arrêts, si ce n’est que dans un but de diffusion. La supercherie est là, les personnages savent déjà que leur film sera diffusé. Leur psychologie n’est pas si sommaire que cela: ils se révèlent vaniteux, et illustrent ce journalisme américain toujours à la recherche d’un sensationnisme et d’un démantèlement de complot. Et surtout ils reflètent la psychologie de leur réalisateur, tout aussi vaniteux, qui croit en son succès. Ici, il s’agit de prouver que ce qu’on nous a toujours dit est faux: les fantômes existent! Mais nous ne sommes pas dupes, nous mettrons à jour la vaste supercherie gouvernementale. Vous vous devez de nous croire, nous faisons un documentaire, les images ne mentent pas. Hélas si, de nos jours, les images mentent, les apparences sont bien souvent trompeuses. L’analogie à Hitchcock devient alors des plus tentantes. Lui qui, dans fenêtre sur cour, montrait déjà les dangers de la déduction du spectateur. Un film nous donne une série d’indices qui nous permettent ainsi d’aboutir à nos propres conclusions. Mais parfois, nos conclusions se révèlent fausses. Le pouvoir du documentaire comme étant une forme du « vrai » vont forcément séduire ces cinéastes a la recherche de réalité faussée. Voilà pourquoi Brian de Palma, grand héritier d’Hitchcock reprend cette forme documentaire dans Redacted.
Alors pourquoi s’attarder sur Paranormal activity, qui n’a pas la puissance allégorique et politique de Zelig (Woody Allen), District 9 (Neil Blomkamp) ou de Redacted (Brian de Palma), justement? Parce qu’il y a quelque chose d’important à en tirer. Une constatation, presque une prophétie : le cinéma entre dans une nouvelle ère. Quand une scène fait peur, se cacher les yeux ne suffit plus. Il faut également se boucher les oreilles, car les effets sonores sont de plus en plus subtils et frissonnants (mais le cinéma doit beaucoup cela au travaille sonore de David Lynch). Et ce qui fait peur, comme nous le disions, c’est la banalité de l’exposition. Ce couple décide de se filmer, comme des millions d’autres couples dans le monde. Mais celui-ci découvre pendant la nuit d’étranges phénomènes. La liberté de se filmer est à son paroxysme, tout le monde peut faire son cinéma, et tout le monde peut capter un événement drôle ou inquiétant. Bienvenu dans un nouveau cinéma, un cinéma numérique, là où tout peut arriver, n’importe quand, n’importe où, et surtout, avec n’importe qui.
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