L’Inconnu

La filmographie de Tod Browning est marquée par la présence de deux acteurs fétiches , Priscilla Dean et Lon Cha­ney. Après neuf films réalisés avec P. Dean, la transition s’opère avec Le Club des Trois (1925) dans lequel Browning engage pour la 3ème fois Lon Chaney. Fasciné, Browning le fait en­trer dans son univers « pour inaugurer une période créativement très faste. »¹Pascale Risterucci, « D’un usage androgyne du monstre sacré : Priscilla Dean et Lon Chaney », Cinémaction, n°125, 2007, p. 85.

Chaney, qui partage les mêmes goûts pour le fantastique, le cirque et l’étrange que Browning, connaît bien le monde de la foire et de la pantomime. L’art de la contorsion et du maquillage sont des caractéristiques inhérentes aux personnages qu’il interprète . « Ni Lon Chaney ni Tod Browning n’ont évoqué leur rencontre, mais à travers leurs diverses déclarations, on peut comprendre qu’elle constituait l’aboutissement logique de leurs évolutions respectives. »²Sandra Larrosa « L’acteur, ce criminel, avait une âme : portraits de Lon Chaney », Cinémaction, op. cit., p. 90. Avec l’arrivée de cet « homme aux cent visages »³Joël Magny, « Tod Browning inconnu », Les Cahiers du Cinéma, n°436, 1990, p. 76. , l’univers de Browning se modifie, « le motif de la mutilation se développe. »⁴Pascale Risterucci, « D’un usage androgyne du monstre sacré : Priscilla Dean et Lon Chaney », Cinémaction, n°125, 2007, p. 87. Chaney exploite son corps à l’extrême, jusqu’à parfois éprouver de réelles souffrances . Dans L’Inconnu, leur septième collaboration, c’est « un peu comme si Lon Chaney nous exposait sa méthode de travail. »⁵Thibault Emin, « L’inconnu : le suicide d’une mise en scène », Cinémaction, op. cit., p. 187. Le corps mutilé de l’acteur est placé sur le devant de la scène, il devient un phénomène : « Dans le monde sans rédemption du cinéma de Browning où la cruauté est toujours de mise, L’Inconnu est cette expérience des limites, impossible à oublier. »⁶C.Tesson, « L’extrémité de l’amour », Les Cahiers du Cinéma, n°569, juin 2002, p. 20.

Après la mort de Chaney en 1930, Browning se tourne vers d’autres personnalités telles que Bela Lugosi, mais il ne trouvera pas la même alchimie .

Clémence Jacquot

• 1
  Pascale Risterucci, « D’un usage androgyne du monstre sacré : Priscilla Dean et Lon Chaney », Cinémaction, n°125, 2007, p. 85.
• 2
  Sandra Larrosa « L’acteur, ce criminel, avait une âme : portraits de Lon Chaney », Cinémaction, op. cit., p. 90.
• 3
  Joël Magny, « Tod Browning inconnu », Les Cahiers du Cinéma, n°436, 1990, p. 76.
• 4
  Pascale Risterucci, « D’un usage androgyne du monstre sacré : Priscilla Dean et Lon Chaney », Cinémaction, n°125, 2007, p. 87.
• 5
  Thibault Emin, « L’inconnu : le suicide d’une mise en scène », Cinémaction, op. cit., p. 187.
• 6
  C.Tesson, « L’extrémité de l’amour », Les Cahiers du Cinéma, n°569, juin 2002, p. 20.