Où est la maison de mon ami ?

Chemin faisant, chemin zigzagant

Si Ahmad ne rend pas avant la tombée de la nuit le cahier de son ami, ce dernier sera renvoyé de l’école. Voici la quête existentielle de l’enfant. Mais comment se faire entendre lorsque les adultes n’écoutent pas ?

Dans Où est la maison de mon ami ?, premier film de la trilogie de Koker réalisé par Abbas Kiarostami, l’initiation se fait par le chemin. Placé du point de vue de l’enfant et de sa découverte du monde, le récit est embarqué dans une odyssée dans la campagne iranienne. Le positionnement de l’enfant perturbe et enrichit le récit, alors qu’il est obligé d’avancer dans un monde qui ne lui prête aucune attention. Celui-ci pose un regard interrogateur sur les adultes auxquels il est censé obéir, qui ne cessent de se contredire. L’innocence de Ahmad et la nécessité de sa quête suscite une réflexion sur le fossé générationnel. Durant sa trajectoire vacillante, Ahmad se heurte à différents personnages dignes des contes, qui enrichissent son aventure de répétitions, d’allers et de retours, et d’impasses.

La route en zigzag – tracée par l’équipe du film – amenant à Pochté, le village de son ami, est empruntée trois fois, sans coupure, par le protagoniste. Kiarostami dit à propos de ce Z : “ il ne mène nulle part mais il mène quelque part, parce que c’est un chemin sans fin et ce genre de chemin mène à beaucoup d’endroits au moins pour moi”¹Dans Abbas Kiarostami, vérités et songes, Limosin Jean-Pierre, documentaire, 1994, 52’.. La logique narrative des films de Kiarostami privilégie la répétition et la variation des motifs plutôt que la dramaturgie classique. Dans ce contexte de l’enfance, on y voit l’apprentissage par l’essai, l’initiation par le chemin. Abbas Kiarostami dresse ici avec justesse à travers un périple chancelant, l’univers intérieur de l’enfance et la générosité humaine qui en ruisselle.

Garance Juin

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  Dans Abbas Kiarostami, vérités et songes, Limosin Jean-Pierre, documentaire, 1994, 52’.