Mon voisin Totoro

la nature (ré)enchantée

Le Japon a une relation particulière à la nature, qui tient une place importante dans sa culture et ses traditions, et donc dans son cinéma. Issue de la pensée shinto et bouddhiste, la préoccupation des japonais pour la nature a été décuplée par les différentes catastrophes environnementales et nucléaires qu’a subi le pays. Pour autant, cette relation entre l’homme et la nature reste assez paradoxale. Elle oscille en effet entre la fascination, le respect de l’homme pour cette dernière et la volonté de toute société moderne de la contrôler, de la dompter, par exemple après-guerre, par une forte urbanisation des campagnes – que montre Isao Takahata dans Pompoko. Au Japon, la nature a ses lois, mystérieuses, ancestrales, avec lesquelles tout être vivant est en osmose, mais dont l’homme a fini par se couper.

Cette cohabitation entre progrès et nature semble cependant possible à Hayao Miyazaki. A l’image de son œuvre, son film Mon voisin Totoro donne un souffle à cette aspiration, et dépeint un monde où les personnages évoluent harmonieusement entre passé traditionaliste et arrivée de la modernité. Le « chat-bus » du film étant, parmi d’autres, un représentant haut en couleurs de cette mutation de la campagne. 

La force du cinéma d’Hayao Miyazaki est de donner vie à ce « réenchantement » de la nature. C’est d’ailleurs, plus largement, presque celle de l’animation japonaise dans son ensemble, dont l’une des spécificités est de rendre avec une grande précision les détails de la nature, souvent foisonnante, nous permettant de la (re)découvrir par un autre point de vue. L’enfant en particulier trouve plus aisément qu’un autre le chemin vers son énergie bienfaitrice, ses vertus magiques. Avec Mon voisin Totoro, le spectateur se remémore la joie enfantine de son exploration, le bruit de la pluie qui tombe dans les flaques ou sur un parapluie, celui du vent qui souffle sur les plaines…

Ambre Vigne